Dans la première partie de cet entretien exclusif, l'entraîneur du Stade Français évoque le parcours européen de ses joueurs, dont ce poignant souvenir du 13 novembre à Leicester.

Pour le Stade Français, tout a commencé ce lugubre vendredi 13 novembre. Quels souvenirs en gardez-vous?
Le silence dans le vestiaire après la rencontre. Les têtes ne sont jamais trop joyeuses après une défaite, mais on avait fait un match correct. Quand on a compris, ça nous a froid dans le dos. Pendant quelques minutes, personne ne parlait. Tout le monde essayait d’appeler chez soi. On a vite su que Rémi Bonfils avait été pas loin, qu’Aristide Barraud, un ancien du club, avait été touché. Certains n’arrivaient pas à joindre leur famille et commençaient à paniquer parce qu’ils savaient qu’elle était en ville… Revenus à l’hôtel, on a commandé des sandwichs et des bières et avec une dizaine de joueurs et on a regardé ensemble les infos dans le hall jusqu’à 4 heures du matin. Tout le monde était sous le choc.

Puis il y eut le report du match face au Munster à Jean-Bouin…
On y avait beaucoup réfléchi. C’était la bonne décision, même si ça a compliqué le calendrier, avec un terrible mois de janvier.
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Le double affrontement face à Trévise, avec deux succès bonifiés, a-t-il relancé votre saison?
Déjà à Leicester, on prend des essais casquette mais on produit du beau jeu. On inscrit deux ou trois essais très bien construits. Avec pas mal de jeunes, on rivalise. On n’avait peut-être pas cru assez en nos chances ce soir-là. Mais on sait que si on fait le boulot contre Trévise, on peut s’ouvrir la porte vers un quart. On avait beaucoup de pression en Top 14, on voulait jouer. On a sorti un match plein, de très haut niveau. Tout ce qu’on avait mis en place fonctionnait, on avait le bonus après 25 minutes… Ces deux matchs ont boosté notre confiance et nous ont relancés même si on a toujours eu des hauts et des bas ensuite. Surtout, on ne voulait surtout pas jouer de match de Coupe d’Europe sans enjeu, c’est horrible ça ! Gagner nous a permis d’y croire.

Après un beau succès face au Munster à domicile, vous chutez en Irlande.
Même éliminés, ils étaient très remontés. Dans la semaine, les entraîneurs avaient été mis en danger. C’était un gros Munster face à nous. On fait un bon match mais ça ne suffit pas. Ça nous oblige derrière à assurer un résultat contre le Leicester. Oui, ce parcours est un peu à l’image de notre saison.

Aviez-vous calculé qu’une victoire bonifiée était nécessaire avant le dernier match face à Leicester?
On avait calculé que ça dépendait aussi des autres résultats. On ne voulait pas penser au bonus, on voulait d’abord gagner. On a tous été très étonnés en regardant Clermont-UBB, qui aurait changé notre position dans la hiérarchie. On ne serait alors pas tombés sur Leicester (mais sur les Saracens).

Retrouver les Tigers vous convient-il?
Si j’avais eu le choix, oui, j’aurais préféré un autre adversaire et jouer en France plutôt qu’en Angleterre. En quart de finale, il n’y a plus d’adversaire facile, c’est une évidence, mais certains stades à l’extérieur sont encore plus compliqués. Welford Road en est un, on l’a vu à l’aller. Le fait de les avoir battus va peut-être nous enlever tout complexe. On ne sera pas favoris mais on jouera notre chance à fond.

Que redoutez-vous dans cette équipe ?
Ils sont très forts dans toutes les bases de ce jeu. Touche, mêlée, jeu au sol, ils sont très structurés, à l’anglaise. Il faut être au rendez-vous des rucks, sinon ils grattent tous les ballons. On peut arriver à les lire, mais comme tout est bien fait, c’est très dur de les contrer; Et à Welford Road, quand tout est en place et que le public pousse, ça devient un rouleau compresseur. Pour moi, c’est une des deux ou trois meilleures équipes d’Europe. Régulier, disciplinés sur 80 minutes. Pas toujours spectaculaire mais très souvent très efficace.